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Tapis dans l’ombre, Antoine Lafond

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Tapis dans l’ombre, pour mettre les joueurs en lumière, l’interview des reporters-poker: Antoine Lafond (Card Player).

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« J’ai toujours dit que le poker c’était comme la drogue, tu ne deviens pas riche en consommant, mais en travaillant dedans. »

Antoine est dans le milieu du poker depuis les grands débuts « médiatiques » de notre jeu-sport-passion favori. Son regard en est d’autant plus intéressant. Beaucoup de liens créés avec les acteurs majeurs, beaucoup de recul et d’expérience. Les mots sont justes, le discours humaniste.

1-      Peux-tu te présenter en quelques lignes (cursus pour arriver à ce poste, expériences dans le poker, emploi actuel…)?

J’ai découvert le poker grâce au World Poker Tour présenté par Patrick Bruel sur Canal + (combien de fois ai-je entendu ça par la suite?). J’ai très vite adoré ce jeu aux règles simples mais aux facettes complexes. Et puis les épisodes du World Poker Tour étaient vraiment très bien filmés. Il y avait toujours des personnages aux tables, c’était vraiment du spectacle. Je me suis donc intéressé à ce jeu. J’ai donc décidé d’intégrer un club de poker près de chez moi à Nantes : Allinouest. C’est le point de départ de mon aventure poker.

En 2007, j’ai accompagné des joueurs de mon club à San Remo pour la finale de la troisième saison du France Poker Tour. J’y ai fait un petit coverage sur le site du club avec d’autres membres. C’est là-bas que j’ai rencontré des personnalités du poker comme Antoine Dorin, Cédric Billot ou encore Alexandre Henry qui étaient alors à la Fédération Française des Joueurs de Poker (FFJP). J’ai proposé mes services pour écrire des news sur le site qui n’était pas vraiment mis à jour régulièrement. Antoine m’a contacté et m’a chargé d’un projet bien plus ambitieux : le classement des joueurs de poker. Live Poker s’est très vite greffé au projet et j’avais donc enfin un pied dans cet univers.

En parallèle, j’étais étudiant à l’Université de Nantes. Après un DEUG d’Histoire j’ai bifurqué vers une Licence Information et Communication. Il me fallait un stage, je l’ai fait à la FFJP. Puis en Master 1 j’ai fait un stage chez Live Poker avec Georges Djen et Nicolas Niémant et pour finir mes études je suis repassé à la FFJP. J’ai fait quelques coverages lors de cette période. Mon tout premier coverage a été fait pour Live Poker sur le Partouche Poker Tour de Nice, un Super Satellite. Je trouvais ça déjà impressionnant, mais ce n’était rien par rapport au suivant : la grande finale de l’European Poker Tour. J’avais juste l’impression d’avoir traversé l’écran de télévision! Des joueurs célèbres en veux-tu en voilà, j’étais dingue!

J’ai croisé beaucoup de joueurs, j’ai appris à les connaître et ce fut notamment le cas avec Philippe Ktorza et Éric Haïk. Éric trustait le haut du classement à l’époque et il m’avait contacté pour gérer quelques aspects de sa communication. Nous avons beaucoup travaillé ensemble et c’est lui qui m’a fait intégrer le projet Poker Leaders en avril 2010. J’ai accompagné ce projet jusqu’à la fin en septembre 2012 en écrivant des articles au quotidien et en réalisant des coverage, parfois seul, parfois avec mon ami Aymeric Gosciniak.

Je suis donc dans le milieu du poker depuis un petit moment et mon intégration pleine dans cet univers a été réalisée grâce aux personnes que j’ai pu citer dans ma réponse.

2- Les voyages (Vegas, Cannes, Dublin, San Remo…), les hôtels de luxe, les virées nocturnes avec les joueurs, les Royal Flush Girls, être payer pour voir des tournois de poker… En gros, c’est le métier de rêve, non?

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Je suis probablement l’un des journalistes/reporters qui réalisent le moins de coverage dans le milieu et ça me va plutôt bien. En déplacement, c’est clair, je n’ai pas à me plaindre. J’ai toujours été très bien logé, j’ai parfois passé des soirées assez inoubliables, mais en soi, le rythme des reportages est soutenu. On arrive à 11h00 en salle de presse et on part parfois à minuit passé.

Je n’ai jamais un fan des soirées avec les joueurs ou avec les confrères. Une fois que la journée est terminée, soit je file dans ma chambre, soit je dine avec des amis joueurs et ça s’arrête là. Je participe rarement aux sauteries un peu trop folles pour moi. Je me considère déjà trop vieux pour ça… I’m too old for this shit comme dirait l’autre. En reportage j’en profite surtout pour discuter avec les joueurs, ou plutôt avec les hommes et les femmes qui sont sur le field. On met de côté l’aspect poker et on discute de tout et de rien.

Après, personnellement, comme je le disais, je suis surtout journaliste, donc j’écris des articles au quotidien. J’ai un boulot très solitaire mine de rien. Donc oui, quand je sors en reportage, ça fait toujours plaisir de voir les joueurs, les croupiers et floors. Il y a de bons aspects et de mauvais aspects à ce métier. Ne souhaitant pas progresser techniquement, les reportages peuvent vite m’ennuyer. On bouffe poker, on dort poker, on parle poker… Au bout d’un moment, sincèrement, ça abrutit totalement! Je fais donc le maximum pour couper quand j’ai fini de travailler et j’en profite donc pour discuter d’autres choses.

Donc non, ce n’est pas le métier de rêve, mais il ne faut pas non plus se plaindre, surtout quand on bénéficie d’une liberté de ton totale comme moi. Et je remercie tous mes patrons pour me l’avoir laissée.

3- Es-tu toi-même joueur? A quel niveau te situes-tu?

J’ai été très joueur fut un temps jadis. Justement à l’époque où j’ai découvert le poker grâce à Patrick Bruel. Ça a duré trois, quatre ans et après je me suis éloigné du jeu pour m’intéresser au milieu en lui-même. J’ai toujours dit que le poker c’était comme la drogue, tu ne deviens pas riche en consommant, mais en travaillant dedans. Cette phrase en choquera probablement plus d’un car faire le parallèle entre le poker et la drogue ce n’est pas bien, mais sur le principe que je fais le parallèle. Bref, j’espère que l’on me comprendra lorsque je dis ça.

Je ne suis donc presque plus joueur. Je joue une fois de temps en temps. Je vais au casino une fois tous les six mois maintenant pour faire une petite session de cash game en 2 €/4 € et je participe à un tournoi tous les quatre mois. Je ne joue plus du tout sur internet depuis l’arrivée du «.fr». J’ai arrêté parce que je suis trop fainéant pour envoyer les papiers justificatifs demandés. J’avais mes habitudes sur le «.com» donc j’ai stoppé. Et comme je n’ai jamais voulu gagner ma vie en jouant au poker, je n’ai pas déménagé.

De plus, maintenant, je préfère dépenser l’argent qui allait dans le poker pour d’autres choses. Je m’achète des CD, des DVD (ouais, en mode old school), je me fais des cadeaux. Bref! J’évite de perdre de l’argent. Et puis le poker jouait trop son mon humeur. Quand je gagnais tout allait bien et quand je perdais je faisais la gueule. Donc j’ai préféré arrêté et désormais je joue vraiment juste pour le fun.

 

4- Le fait de côtoyer les meilleurs joueurs et de relater des milliers de moves te permet-il de progresser dans ton jeu?

Comme je le disais, je ne cherche pas à progresser. J’écoute donc les joueurs quand ils me racontent un coup, mais très sincèrement je le fais surtout pour les lecteurs. Dans l’actualité j’aime donner mon avis car je pense m’y connaître suffisamment, dans les reportages, lors que je vois un coup, je préfère le relater tel que je l’ai vu, ni plus ni moins. J’utilise d’ailleurs très très peu de termes spécifiques… Les donkbet, 3-bet, New York Back Raise et tout ça… Je ne les utilise pratiquement jamais.

5- As-tu créé des liens particuliers avec certains joueurs/ses?

Oui! J’ai créé des liens particuliers, forcément. Mais comme je le disais, j’ai surtout créé des liens avec les hommes et les femmes plus qu’avec les joueurs et les joueuses. Philippe Ktorza, Éric Haïk, toute la Team Poker Leaders, Guillaume Darcourt, Franck Kalfon, Stéphane Benadiba, Julien Sitbon, Pascal Oren, Jean-Paul Pasqualini (oui, j’ose le dire) et beaucoup beaucoup d’autres et d’âges différents. Je respecte également quelques confrères comme Tommy Mandel que j’adore, mon ami Modjo de Pokernews France, Nicolas Schull (ancien journaliste de chez Partouche), Maxime Arnou et tous ses stagiaires, Elaine YoungMoneyMaker… J’ai également noué de très bons contacts avec les croupiers et floors du circuit. Ils sont tous géniaux et font un travail formidable. Ce sont des hommes et des femmes géniaux!

Mais l’une de mes plus belles rencontres dans ce milieu reste Aymeric Gosciniak. Une tellement bonne rencontre que les gens pourraient croire que nous sommes ensemble. Au final, vers la fin, c’est vrai que nous agissions comme un vieux couple. On dormait dans des lits séparés, on s’engueulait parfois mais on s’aimait beaucoup! Je l’ai rencontré pour la première fois au Partouche Poker Tour, il travaillait alors pour Winamax. On a très vite accroché. On s’est revu quelques temps après pour la finale du France Poker Tour et on était un peu comme des gosses.
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Notre duo fonctionnait extrêmement bien car justement nous sommes devenus amis (un peu comme Benny et Yu sur PokerStars Live qui se connaissaient depuis longtemps). Malheureusement la fin de l’aventure Poker Leaders a coïncidé avec la fin de notre duo dans le milieu du poker. Je pense que nous avons toujours quelque chose à faire ensemble professionnellement même si ses propos à l’égard du milieu du poker sont durs. Aymeric a toujours été quelqu’un d’entier et je peux comprendre son ras-le-bol, mais je pense que nous n’avons pas encore tout donné ensemble.

6- Quel est ton meilleur souvenir pokéristique en tant joueur ?

Je peux en trouver plusieurs… Mes réguliers deep run dans les tournois de la presse en mode olé olé Ave Maria (ce sont des souvenirs plutôt drôles), mais je me souviens surtout de deux coups que j’ai joués l’année dernière en cash game et notamment deux calls totalement improbables et chers à la river en priant pour que le mec soit plus en pampa que moi et jette ses cartes sans les montrer. J’ai essayé deux fois et c’est passé. De la chance sans doute mais une énorme fierté quand les jetons arrivent.

7- Et en tant que journaliste?

J’ai quelques souvenirs en tant que journaliste oui… Des bons et des mauvais… Écrire l’article sur la mort d’Éric a été quelque chose de difficile. On attendait beaucoup de moi en plus car j’étais le journaliste qui le connaissait le mieux, j’étais un membre à part entière de la famille Poker Leaders… Cela reste un souvenir très très fort dans ma jeune carrière. Le fait que je sois totalement libre de ton a également permis de lui rendre un hommage. Je n’oublierai jamais ça.

Dans le genre souvenir bizarre, le Black Friday restera également gravé dans ma mémoire. Cet épisode a tout simplement été une bombe et un vrai casse-tête à traiter. Pour être honnête, j’ai beaucoup appris de Benjamin «Benjo» Gallen qui écrit pour Winamax. Sa manière de traiter le sujet a juste changé ma vision du boulot. Il a traité ce sujet avec tellement de professionnalisme, a réalisé un paquet de recherches. J’ai l’impression qu’il y a un avant et un après Black Friday pour moi aussi. Je ne me souviens plus de comment je travaillais avant ce fait là.
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Après il y a les victoires des amis, les fois où j’ai vibré en suivant les membres de la Team Poker Leaders… J’avais été heureux de la victoire de Marvin Rettenmaier lors de la finale de la première saison des France Poker Series. J’ai savouré comme il se doit la table finale de Lucille Cailly l’année dernière. Idem pour la table finale de Paul Guichard à Deauville. Bref, beaucoup de souvenirs.

294741_235573646480560_2936102_n8- Des sites et des magazines mettent la clé sous la porte, des joueurs sont soumis à des contrôles fiscaux, des tournois importants perdent en affluence… Le beau château de cartes du poker ne serait-il pas en train de s’effondrer?

Oui et non. Le milieu évolue et ça, certains acteurs ne l’ont malheureusement toujours pas compris! Donc oui, certains acteurs disparaissent. C’est la sélection naturelle, la théorie de l’évolution, tout ça… Être sur un marché international, c’est quelque chose de plutôt simple, les décisions sont prises dans une certaine globalité. Par contre, une fois que l’on réduit le marché à un pays, forcément la donne change. Certains acteurs ont réussi leur adaptation, d’autres non.

Concernant les joueurs soumis à des contrôles fiscaux, certains avaient vu le coup venir. Je me suis entretenu avec un joueur, que je ne citerai pas, il y a quelques jours et il me disait qu’il avait alerté quelques amis avant la vague de contrôles. Oui ça me peine pour les joueurs car le monde du poker en France (le monde, la France, pas mal) n’avait pas besoin de ça. Notre équilibre est déjà fragile, pas besoin d’en rajouter si je puis dire.

À l’époque du «.com» le poker était un peu un long fleuve tranquille. Aujourd’hui, avec le «.fr» il faut se battre, il faut inventer, il faut être original, il faut faire jouer la proximité… Il y a beaucoup plus de facteurs qui rentrent en jeu.

 

9- Comment voyez-vous votre avenir dans le poker (et/ou autres)?

Beaucoup de possibilités. La finalité : sortir un peu du milieu du poker. Quand j’ai commencé dans ce milieu, et surtout quand j’ai commencé chez Poker Leaders, je disais à tout le monde : «Ça durera un an maximum, après j’arrête! Je veux être au top avec Poker Leaders et partir!». Il n’y a que les cons qui ne changent pas d’avis, non? Ce que je peux dire, c’est que l’avenir est incertain et que les choses se jouent tous les jours. Si un jour le milieu du poker ne veut plus de moi ou si je n’y ai plus ma place, je tracerais ma route, tout simplement. En attendant je continue de faire ce que je fais de mieux : des pavés et donner mon avis!

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